Le marché immobilier suisse traverse une période de tension inédite. Tandis que la demande de logements ne cesse de croître, l’offre, elle, ne parvient plus à suivre le rythme. Le taux de vacance a atteint son niveau le plus bas depuis des décennies, confirmant l’existence d’un déséquilibre structurel.
Dans ce contexte, de nombreux ménages, en particulier les familles, peinent à trouver un logement adapté. Cette situation accentue les inquiétudes quant à l’évolution du marché et à la possibilité d’une surchauffe spéculative à moyen terme.
Publié le 20.10.2025
Le taux de logements vacants en Suisse est tombé à environ 1 %, un seuil considéré comme critique. En dessous de 2 %, le marché est jugé tendu, et lorsqu’il descend à 1 %, on parle de pénurie sévère.
Ce déséquilibre reflète une insuffisance persistante du nombre de logements disponibles, aussi bien à la location qu’à la vente. La demande dépasse aujourd’hui largement les capacités de construction et de mise sur le marché.
Après plusieurs années consécutives de baisse du taux de vacance, il devient clair que cette tension n’est pas conjoncturelle. Elle s’enracine dans une dynamique de long terme, alimentée par une croissance démographique continue, une urbanisation concentrée et une planification du territoire restrictive dans certaines zones du pays
La crise du logement frappe avant tout les zones à forte densité économique, où la demande dépasse largement les capacités de construction.
Les grandes agglomérations comme Zurich, Genève, Lausanne, Bâle ou Berne sont les plus sous pression, avec des taux de vacances souvent inférieurs à 0,5 %. Dans ces villes, la croissance démographique, l’afflux de travailleurs qualifiés et la rareté du foncier maintiennent une tension extrême sur le marché.
Dans le canton de Vaud, les régions de Lausanne, Morges et Nyon illustrent parfaitement cette tendance. L’attractivité du bassin lémanique, combinée à une forte concentration d’emplois, entraîne une hausse continue des loyers et repousse les ménages vers les communes périphériques.
À Genève, la situation est encore plus critique : le taux de vacance avoisine les 0,3 %, et même les localités voisines comme Meyrin ou Carouge peinent à absorber la demande.
Plus au nord, Zurich et son agglomération subissent une pression similaire. Les logements s’y louent en quelques jours, et les loyers ont fortement augmenté dans les communes périphériques telles que Winterthour ou Dietikon.
Enfin, certaines régions touristiques comme le Valais, les Grisons ou Zoug sont confrontées à un déséquilibre spécifique : la multiplication des résidences secondaires et des locations de courte durée réduit le parc de logements destinés aux habitants permanents.
La pénurie, autrefois concentrée dans les grands centres, s’étend désormais à de nombreuses villes moyennes et zones périphériques, créant un effet domino sur l’ensemble du territoire.
La pénurie touche tout particulièrement les logements familiaux, notamment les appartements de 3 à 4 pièces.
Ces biens sont les plus recherchés et simultanément les plus rares, ce qui restreint considérablement les possibilités de relogement.
Ce manque limite la mobilité résidentielle et professionnelle, aggrave les inégalités et freine la stabilisation sociale.
Le déficit de logements adaptés aux familles a également des conséquences économiques : il complique l’installation de nouveaux arrivants, réduit la flexibilité du marché du travail et accentue la pression sur les loyers des biens de taille moyenne.
À terme, cette tendance érode le pouvoir d’achat des ménages et accentue la fracture sociale.
Dans certaines communes, le marché atteint un niveau de saturation extrême : aucun logement n’est disponible ou presque.
Ces zones correspondent souvent à des centres économiques dynamiques où la croissance rapide de l’emploi n’a pas été accompagnée d’une politique d’aménagement suffisante.
Même les terrains constructibles prévus à long terme se retrouvent saturés avant leur mise en œuvre, tant la croissance démographique dépasse les prévisions.
L’urbanisme, bien qu’essentiel, peine à anticiper la réalité immédiate d’un marché sous tension. Ce déséquilibre illustre la complexité d’une planification à long terme dans un environnement économique en mutation constante.
Malgré la forte hausse des prix observée ces dernières années, le marché immobilier suisse ne montre pas les signes typiques d’une bulle spéculative.
Cette évolution s’explique avant tout par une demande réelle et soutenue, alimentée par la croissance démographique, la stabilité économique et la rareté persistante de l’offre, plutôt que par une spéculation excessive ou un endettement massif.
Le système hypothécaire helvétique, strictement encadré, joue un rôle clé dans cette stabilité. Les exigences élevées en matière d’apport personnel, les tests de résistance aux taux d’intérêt et le contrôle rigoureux du niveau d’endettement empêchent les dérives et réduisent le risque d’un emballement du crédit.
Ces garde-fous s’appuient sur des fondamentaux économiques solides : un taux de chômage bas, un franc fort, une croissance maîtrisée et une grande confiance des investisseurs.
Les valeurs immobilières demeurent globalement cohérentes avec la capacité d’achat d’une large part de la population.
Cependant, la tension sur les loyers et la hausse des prix d’achat restreignent progressivement l’accès au logement, surtout pour les jeunes ménages et les familles à revenus moyens.
Ainsi, même si la Suisse échappe au risque de bulle, elle fait face à un défi croissant d’exclusion résidentielle, où la stabilité économique globale masque une fracture grandissante dans l’accès au marché immobilier.
La Suisse fait face à une pénurie de logements durable et complexe, qui met en lumière les limites de son modèle d’aménagement.
Si cette crise ne présente pas les signes d’une bulle spéculative, elle révèle une crise d’accessibilité touchant de plus en plus de ménages.
Les mécanismes de régulation, la prudence du système bancaire et la stabilité économique constituent encore des garde-fous essentiels.
Mais la véritable menace réside dans l’exclusion progressive d’une partie de la population du marché du logement.
Y répondre exigera une vision politique forte, une planification territoriale audacieuse et une volonté commune de rendre le logement à nouveau accessible pour toutes et tous.
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Nicolas Leyvraz
Co-Fondateur de Homewell SA
Expert en immobilier en Suisse depuis 2008